Fermé en 2010, ce lieu emblématique a finalement été conservé par La Poste, qui veut en faire son nouveau « QG ».
Sur la façade, deux dates ramènent à sa construction, de 1889 à 1891. Il fallait bien trois ans pour venir à bout du monument. Un bâtiment gigantesque dont la plus vaste façade s’étend sur plus de 110 mètres et la cour intérieure flirte avec les 1 200 m². Conçu par l’architecte aixois Joseph Huot, l’hôtel des Postes de la rue Colbert (1er) était un véritable palais dédié aux télécommunications. Les « P et T », comme l’on disait alors, avant que « Téléphone » ne s’ajoute à Poste et Télégraphe pour former les PTT.
Derrière ces murs, flanqués d’une grande horloge à l’heure de Paris – une prouesse à une époque où les pendules n’étaient pas vraiment synchronisées – et ornés de médaillons à l’effigie des physiciens Coulomb, Volta, Ampère et Faraday, des centaines de postiers oeuvraient à l’acheminement et au tri du courrier marseillais. Tandis que les « demoiselles du téléphone » raccordaient les lignes des premiers privilégiés équipés de combinés. La tour, qu’un figuier sauvage occupe désormais à la pointe est du bâtiment, côté rue Saint-Cannat, abritait en effet le premier central téléphonique de la ville, qui concentrait les lignes de 440 abonnés en 1889.
La fin d’une époque :
Mais après 120 ans de bons et loyaux services, ponctués de moments d’Histoire – la nouvelle de l’armistice du 11 novembre 1918, signé deux heures plus tôt, parvint dans le grand hall de la poste Colbert sous les hourras des usagers et une Marseillaise qui semble encore y résonner – et de luttes sociales épiques, La Poste a fermé son bureau en 2010. Et les derniers services ont quitté le bâtiment en 2012. Le site, bien qu’emblématique ne correspondait plus aux besoins de l’époque, dixit l’entreprise, passée d’une logique de « gros point central » à celle de branches et de points de vente plus petits et disséminés sur le territoire. Ainsi un petit bureau, organisé en îlots, dans l’esprit du moment, a été créé dans la foulée, juste à côté, rue Saint-Cannat. Et il s’y trouve toujours.
Des vélos et des rumeurs :
Restait à trouver une nouvelle destinée à ce bâtiment, si vaste qu’en vidant les sous-sols, deux vélos de postiers datant des années 1920 ont été retrouvés et remis, depuis, à un musée. Problème, La Poste n’était pas la seule propriétaire des lieux. Un autre héritage encombrant compliquait toute opération : PTT obligent, la Poste Colbert appartenait encore, pour partie, à France Télécom, devenue Orange. « Il a donc fallu se mettre d’accord avec Orange, pour acquérir l’ensemble, ce qui a pris près d’un an », explique-t-on à La Poste.
Un délai pas vraiment de trop, dans la mesure où le choix d’un projet n’était pas encore arrêté. La vente de l’hôtel des Postes a même été envisagée, tandis que les rumeurs allaient bon train, alléchant les promoteurs, qui agitaient jusqu’à la rue Barbusse des estimations dépassant les 10 millions d’euros. On y a prédit un marché couvert, un Apple store, ou encore un Virgin. Mais finalement, rien de tout ça. « Il y a eu des réflexions, des scénarios… On a une foncière, Poste Immo, qui se charge de ce genre de problématique, et le meilleur choix s’est avéré de garder ce lieu pour en faire notre QG », explique Christine Bord le Tallec, déléguée régionale du groupe, planches et vues de synthèse à l’appui.
Des postiers mais plus de courrier :
À l’issue d’un appel à projets, la rénovation du site Colbert a été confiée à l’architecte Roland Carta, en vue d’en faire un « village La Poste ». Un lieu qui rassemblera toutes les « fonctions support » de l’entreprise : direction régionale, communication, ressources humaines… bref, 400 postiers, mais pas de courrier. « Un site ouvert qui sera la vitrine de nos savoir-faire », note Christine Bord le Tallec, qui ajoute « qu’il y aura probablement des commerces et des entreprises. Mais c’est quelque chose dont on discutera avec la municipalité, car c’est un véritable projet de ville, dans lequel La Poste a une responsabilité d’aménageur ».
Reste un chantier qui n’en est pour l’heure qu’aux travaux préparatoires, entamés en juin 2016. La construction, à proprement parler, n’interviendra qu’après la désignation de l’entreprise prestataire – le budget du projet se chiffrant en millions d’euros – pour une livraison espérée au deuxième trimestre 2019.
Source : La Provence